S’installer en agriculteur.trice ?

Ce dossier a été réalisé avec l’appui de l’Addear du Rhône, en lien avec Florent Martel, que nous remercions encore ! A RECITS, et vu le monde qui vient, nous considérons l’agriculture comme l’une des grandes priorités, si nous voulons conserver la possibilité de nous alimenter correctement. C’est un enjeu écologique fort, tant le modèle actuel est destructeur et suicidaire.

Notre « modèle » agricole actuel est une impasse !

Non seulement notre agriculture produit 20 % des émissions de gaz à effet de serre, mais en moins de trois générations, la fertilité pourtant réputée des sols français, a été en grande partie dégradée à cause de pratiques culturales intensives qui s’appuient sur une productivité maximale. Sur l’ensemble de l’Europe, au moins 70% de l’activité biologique des sols cultivés a été détruite (FAO, voir le lien ICI).

La crise climatique vient considérablement aggraver les problèmes liés à la destruction biologique des sols, à leur dégradation chimique, à leur érosion. Ces vingt dernières années ont été les plus sèches depuis trois mille ans.
Ce qui fait peser une lourde menace de crise alimentaire tant notre capacité de résilience est faible.

A tout cela, se rajouter le problème démographique. Nous allons avoir besoin de paysans ! Le besoin en renouvellement des exploitants agricoles est estimé à plus de 50 % dans les dix ans. De plus, en raison de la nécessité de recourir à des techniques plus sobres et durables (décarbonation de l’agriculture), certaines études évaluent les besoins supplémentaires en effectifs à près d’un demi-million de personnes avant 2050 (Shift project, 2021). D’autres estimations vont jusqu’à plus d’un million d’agriculteurs en plus (Confédération Paysanne) sans compter le développement de l’agriculture urbaine et citoyenne.

Construire son projet

Première règle à retenir : chaque projet est unique. Certain.es pourront choisir de s’impliquer totalement dans une exploitation agricole, d’autres de conserver une activité salariée à temps partiel. Construire correctement son projet ne s’improvise pas en quelques semaines mais cela peut prendre une à trois années parfois (tout dépend du secteur géographique, de la pression foncière…). C’est une démarche engageante qui demande du temps et de très nombreux facteurs doivent être étudiés précisément (voir notre encart ci-dessous).

Les étapes (source Addear 69)

Tout prendre en compte :

  • le type de production ou le type de ferme à reprendre,
  • le degré et le type de mécanisation
  • les équipements nécessaires (chambres froides…)
  • l’adéquation avec le mode de vie,
  • les charges et contraintes familiales,
  • les objectifs de rémunération,
  • l’organisation du travail,
  • le « modèle économique » et les emprunts éventuels,
  • la gestion et le degré de sous-traitance (pour les semis par exemple),
  • l’habitat personnel,
  • le modèle de commercialisation (et la gestion de la relation client),
  • la politique de prix…
  • Faire une période de test…
  • Le choix du statut.

Choix des techniques culturales : une grande diversité d’approches (et pas de « recettes magiques » !)

Plusieurs options existent pour mener à bien la transition écologique en agriculture.

Ces options ont démontré leur viabilité depuis plusieurs années, voire plusieurs décennies : agroécologie, agriculture paysanne, permaculture, maraîchage sur sols vivants, cultures sans labours, maraîchage bio-intensif, agriculture naturelle… Mais au-delà de ces « écoles », Il faut surtout retenir la nécessité de se questionner en permanence, d’expérimenter de nouvelles pratiques inspirées par l’observation, la discussion avec des pairs, des lectures…

S’il est fondamental que des réseaux formels ou informels d’expérimentation et d’échanges se développent pour augmenter la connaissance de la diversité des techniques et pratiques possibles, ces réseaux sont surtout nécessaires pour mettre en lumière et partager des raisonnements, des modes de pensée, des grands principes de réflexion écologique que chacun pourra ensuite traduire et adapter à son contexte, plutôt que de copier-coller ce qui se passe ailleurs.

Se faire accompagner

Bénéficier d’un accompagnement augmente considérablement les chances de survie sur le long terme (comme pour tout projet de création d’entreprise).

Les principales structures d’accompagnement recommandées sont les suivantes : réseau des ADDEAR, réseau de la FNAB, réseau des CIVAM, réseau des AFoCG*, chambres d’agriculture. Dans certaines zones, plusieurs de ces structures et d’autres sont regroupées dans des pôles InPACT permettant une meilleure interaction entre elles, des actions communes et une plus grande visibilité pour les porteurs de projet.

*InPACT Rhône-Alpes regroupe Accueil Paysan, l’Afocg de l’Ain, Alliance PEC, l’Ardear, la FR Civam Rhône-Alpes, Agribio Drome, Terre d’envies et Terre de liens.

L’accompagnement de l’ADDEAR

L’ADDEAR du Rhône organise son accompagnement des porteurs de projets à l’installation autour :

Des réunions mensuelles d’accueil des porteurs de projet à l’installation, pour présenter nos actions et échanger sur les projets des personnes qui souhaitent s’installer
Des formations collectives, dont vous retrouverez le programme dans le catalogue de formations ADDEAR 69 sur l’installation www.agriculturepaysanne.org/rhone
Une formation « phare » pour commencer à approfondir les différents aspects de son projet d’installation : la formation « Mûrir ses idées pour en faire un projet » qui a lieu 2 à 3 fois par/an et s’étale sur 5 – semaines.
Des cafés installation et cafés rencontre, afin d’échanger dans une ambiance conviviale sur vos projets agricoles et/ou vos expériences de l’installation agricole
Un accompagnement personnalisé des projets individuels et collectifs avec possibilité de faire des diagnostics et études de faisabilité (agrément par la région).
Du développement de lieu test agricole en archipel
L’envoi d’informations diverses telles que pistes foncières, offres d’emploi ou invitation à des évènements ou formations, pour les porteurs de projet inscrits dans sa base de données.

S’inscrire dans une démarche collective avec le principe des « fermes partagées »

Et oui, on en reparle encore  ! Le cadre collectif rassure et sécurise les parcours des nouveaux venus. Reprendre des fermes, à plusieurs, pour en faire aussi des lieux pas seulement agricoles mais ouverts aussi à d’autres activités (artisanales, culturelles) nous semble être une réponse efficace et enthousiasmante. La coopérative « les fermes partagées » accueille les groupes qui seraient intéressés par cette démarche. Relire notre interview dans le premier numéro de mars 2023 : à télécharger librement ICI.

Se former

Le BPREA confère la capacité agricole. Mais ce diplôme est indispensable seulement si vous envisagez de percevoir la DJA (Dotation Jeunes Agriculteurs, si vous avez moins de 40 ans).

En fonction de vos compétences déjà acquises, d’autres formations plus spécialisées peuvent être nécessaires ou judicieuses (arboriculture, aviculture, concevoir un atelier de transformation de légumes à la ferme, etc.).

Le woofing peut être très formateur (surtout si vous êtes, à l’origine, un « urbain » !). Un demandeur d’emploi peut réaliser une période de Woofing via une « Pmsmp » (période d’immersion professionnelle, qui est une prestation du Pôle Emploi).

Anticiper les difficultés et comprendre les facteurs de réussites

« S’installer seul », « être en autonomie », etc. Autant de rêves qui ne vont très probablement pas résister à la (dure) réalité !

C’est l’ancrage dans un réseau de paysans, l’entraide agricole avec la mutualisation des outils et des liens de solidarité qui, au contraire, peuvent permettre de surmonter les difficultés (démotivation passagère, problèmes de trésorerie, intempéries…) et d’éviter… le burn-out !

Les aides à l’installation

Les aides de Pôle Emploi

Elles permettent à des personnes indemnisées soit de percevoir l’ARCE, soit de bénéficier d’un maintien de leurs Allocations de Retour à l’Emploi (ARE). Se rapprocher d’un conseiller Pôle Emploi pour en savoir plus ou consulter le site pole-emploi.fr. Voir aussi le site de la BPI ICI.

L’aide à l’installation : Dotation jeunes agriculteurs (DJA).

La dotation Jeunes Agriculteurs (DJA) est accordée à condition notamment que le porteur remplisse une condition de capacité professionnelle agricole, et ait établi un plan d’entreprise sur 4 ans qui traduit l’élaboration d’un projet d’installation viable du point de vue économique permettant de dégager un revenu agricole suffisant. Une possibilité d’installation progressive a été mise en place pour des projets qui atteignent la solidité économique au terme seulement du plan d’entreprise.

Le montant de la DJA est variable. En 2021, le montant moyen de la DJA est d’environ 32 470 €. Plus élevé en zones défavorisées et en montagne, ce montant est modulé pour donner un coup de pouce supplémentaire aux installations hors cadre familial, aux projets répondant aux principes de l’agro-écologie et aux projets générateurs de valeur ajoutée et d’emplois.

L’introduction en remplacement des prêts bonifiés d’une nouvelle modulation de la DJA, fonction de l’effort de reprise et de modernisation de l’exploitation, permet d’accentuer davantage la revalorisation du montant de l’aide à l’installation depuis 2018.

Des aides complémentaires à la DJA :

Les bénéficiaires de la DJA peuvent prétendre à des aides complémentaires : abattements fiscaux, allègement de la taxe sur le foncier non bâti, exonération partielle des cotisations MSA… 

Le programme AITA est ouvert à l’ensemble des candidats à l’installation, avec une priorité pour les jeunes s’installant en dehors du cadre familial, ainsi qu’aux futurs cédants.

En fonction des priorités définies par les régions ou les départements et sous certaines conditions, ce programme offre la possibilité d’accorder des aides pour les actions suivantes : aides au conseil pour les cédants et pour les futurs exploitants, étude de marché, diagnostic de l’exploitation à reprendre et à céder, formation et accompagnement, suivi du nouvel exploitant, aides à la transmission (pour des exploitations préalablement inscrites au répertoire départ-installation, pour la transmission globale du foncier).

Pour constituer un dossier, s’adresser à la DDT/M, Chambre d’agriculture, DAAF (DOM) ou Agence de Services et de Paiement (DOM).

Les aides AITA peuvent également être financées par les collectivités territoriales. Les demandes doivent alors être effectuées auprès de la collectivité concernée. Voir le site du ministère de l’agriculture et de la l’alimentation.


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