Retour au menu

L’ESSENTIEL
Une réponse urgente et globale
La régénérescence de nos biotopes, sauver et régénérer – autant que possible – la biodiversité, c’est la protection des forêts, des mers, des tourbières, des zones humides… C’est la création de nouveaux Parcs Naturels (et de zones de « réensauvagement »), la préservation des pollinisateurs, de la fertilité des sols ou encore la redéfinition des zones d’habitation et la végétalisation des villes, etc.
La réponse ne peut être que globale et transverse à l’ensemble des activités humaines.
Ce devrait être une évidence : la protection de la biodiversité est aujourd’hui trop souvent occultée par le climat. Ces deux enjeux sont pourtant plus que jamais fortement liés : les écosystèmes jouent un rôle fondamental dans la régulation du climat et les changements climatiques constituent l’une des menaces majeures sur la biodiversité.
Le dérèglement climatique n’est pas une cause mais une conséquence d’un modèle civilisationnel NON VIABLE.
Nous aurions beau solutionner le problème énergétique – et ne plus émettre aucun gramme de GES pour produire toute l’énergie dont nous aurions besoin – et stopper dès demain le réchauffement moyen global, nous n’aurions pas résolu le problème de l’extinction du Vivant (de part nos pollutions et notre course effrénée à la croissance).
Les limites de la « stratégie nationale biodiversité 2030 »
Un premier volet de la stratégie nationale biodiversité 2030 avait été engagé avant la COP15. La stratégie de l’UE « en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 » est un plan global qui ambitionne de protéger la nature et à « inverser la tendance à la dégradation des écosystèmes ». Autant le dire de suite : les moyens ne sont pas à la hauteur des ambitions affichées. D’abord, pour l’essentiel, elle n’instaure aucune cadre juridique contraignant et les échéances demeurent mystérieuses (« éployer des aires protégées sur 30 % de notre territoire incluant 10 % de protection forte « , oui, mais quand ?). Il aura donc fallu des années pour que la montagne accouche d’une petite souris.
Comme le notent nos amis de Reporterre, « Dans les faits, beaucoup des mesures listées dépendent de la mise en œuvre de lois déjà votées, comme l’objectif de zéro artificialisation nette, ou de programmes encore en cours d’élaboration, tel le plan Ecophyto pour réduire l’usage des pesticides« . Plan écophyto qui, il faut le rappeler, a été « provisoirement » (?) enterré suite à la bronca des agriculteurs, pour réapparaître en mai 2024. Pour rappel, ce plan lancé en 2008, n’a jamais rempli son objectif de réduire de 50% l’usage des pesticides de synthèse. Avec la nouvelle mouture, il sera désormais impossible d’obtenir la volumétrie des produits utilisés (l’ancien indicateur dit « nodu » étant remplacée par un nouvel indicateur de « dangerosité », le HRI1).
Pour résumer la duplicité gouvernementale sur le sujet, il suffit de citer le rapport de deux inspections, daté de novembre 2022 (Inspection générale des finances et Inspection générale de l’environnement et du développement durable) : les financements en faveur de la biodiversité sont « très largement » inférieurs aux subventions qui lui sont dommageables ». Ces derniers sont évalués à au moins 10,2 Md€ en 2022. Soit un montant 4,4 fois supérieur de ceux en faveur de la biodiversité. En cause ? En premier lieu, et de loin, le soutien aux pratiques agricoles dommageables (6,7 Md€), suivies des aides favorisant l’artificialisation des sols (2,9 Md€) parmi lesquelles figurent aussi des aides du plan de relance en faveur de la relocalisation de l’industrie.
Tabler sur les mobilisations citoyennes ?
Oui, et c’est même la seule stratégie concrète qui nous semble réaliste aujourd’hui. Les associations de défense de la biodiversité sont nombreuses. Des initiatives comme celles menées par l’ASPAS nous semblent fondamentales et aux antipodes de la langue de bois gouvernementale. Entièrement indépendante, l’Association pour la protection des animaux sauvages crée des Réserves de Vie Sauvage où aucune activité humaine n’est autorisée, hormis la balade contemplative, amoureuse et curieuse. Ce label est le plus fort niveau de protection en France. En 40 ans, elle a engagé près de 4000 procédures devant les tribunaux pour faire respecter et évoluer positivement le droit de l’environnement.
Nous pouvons encore citer des initiatives de terrain, comme celle du Réseau pour les alternatives forestières (RAF), qui a créé un fond de dotation (unique en France) permettant d’acheter des terres forestières pour y implanter des activités respectueuses du vivant (source).
Mener le combat sur le terrain juridique
Certains juristes réfléchissent à définir juridiquement le crime d‘écocide et à munir la justice internationale d’un véritable arsenal pénal en matière d’écologie. Mais si le terme se fait une place dans le discours de quelques responsables politiques, il peine à s’imposer juridiquement.
Sur la question de l’environnement, le droit est manifestement dépassé. En droit international, la souveraineté des États reste le principe. L’accord de Paris sur le climat en décembre 2015, qui ne prévoit aucune sanction en cas de non-respect, en est le triste exemple.
Face à ce constat, la juriste Valérie Cabanes, porte-parole du mouvement citoyen « End Ecocide on Earth » (« Arrêtons l’écocide planétaire »), considère que reconnaître juridiquement l’écocide est devenu un impératif moral. « Le droit des entreprises et les règles du commerce mondial sont en train de primer sur les droits de l’homme et ceux de la nature. Il est temps de redéfinir la hiérarchie des normes », estime-t-elle. Et elle n’est pas la seule à le penser : depuis des années, de nombreux juristes militent pour amender le statut de Rome afin de créer un cinquième crime international contre la paix, le « crime d’écocide ».
Peut-on punir les écocidaires ? (Socialter, 2020)
Face aux innombrables destructions environnementales causées par des multinationales ou des gouvernements inconséquentes, le droit pourrait-il fournir une réponse ? Certains juristes réfléchissent à définir juridiquement le crime d’« écocide » et à munir la justice internationale d’un véritable arsenal pénal en matière d’écologie. Article issu du numéro 38 de Socialter « Les ennemis de l’écologie ». et paru en décembre 2019.