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L’ESSENTIEL
C’est quoi ce « marché carbone » ?…
Le principe d’un marché carbone repose sur l’idée de créer un mécanisme économique pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) en attribuant une valeur monétaire aux émissions de carbone. Il existe plusieurs marchés carbone dans le monde, environ une trentaine. Il peut en exister plusieurs pour un même pays (comme aux USA ou au Canada).
Il existe également plusieurs mécanismes. Le principal est celui du système de « plafonnement et échange », aussi connu sous le nom de Cap-and-Trade.
Dans un premier temps, les Autorités gouvernementales fixent un plafond (le « cap) sur la quantité totale de GES qu’un groupe spécifique d’entreprises ou de secteurs économiques peut émettre sur une période données. Ce plafond est généralement réduit au fil du temps, ce qui est censé obliger les entreprises à réduire progressivement leurs émissions.
Dans un second temps, il y a une allocation de quotas : le plafond est divisé en unités de quotas d’émissions ou permis d’émission, qui représentent chacun le droit d’émettre x tonnes de CO2 ou équivalent CO2. Ces quotas peuvent être alloués gratuitement aux entreprises, ou vendus aux enchères par le gouvernement !
Le troisième temps est celui du « trade », de l’échange. Les entreprises qui réussissent à réduire leurs émissions en dessous de leurs quotas peuvent vendre leurs surplus de quotas à d’autres entreprises qui ont du mal à rester en dessous de leurs limites. Cela crée un marché pour les quotas d’émission, où le prix du carbone est déterminé par l’offre et la demande. Sur le papier, les entreprises sont incitées à réduire leurs émissions de manière rentable : celles qui le font efficacement peuvent vendre des quotas excédentaires pour un profit, tandis que celles qui dépassent leurs limites doivent acheter des quotas supplémentaires ou faire face à des sanctions.
… Qui ne fonctionne pas ?
En août 2023, une étude parue dans Science remet largement en cause la prétendue efficacité des marchés carbone sur la base d’une analyse de 26 projets de « compensation » (en reforestation) :
« Les crédits carbone issus de projets de prévention volontaire de la déforestation sont générés sur la base des performances par rapport à des scénarios de déforestation préétablis (ex ante). Nous avons examiné les effets de 26 sites de projets de ce type dans six pays sur trois continents en utilisant des méthodes de contrôle synthétique pour une inférence causale. Nous avons constaté que la plupart des projets n’ont pas significativement réduit la déforestation. Pour les projets qui l’ont fait, les réductions étaient nettement inférieures à celles annoncées. Cela reflète des différences entre les scénarios de référence ex ante des projets et les contrefactuels ex post basés sur la déforestation observée dans les zones de contrôle.« . (passages soulignés par nous).
En 2022, le WWF dressait également un bilan sur l’efficacité des marchés carbone. Il révélait que les grandes industries polluantes avaient reçu près de 100 milliards d’euros de permis de carbone gratuits de la part de l’UE au cours de la période 2013-2021 (voir le rapport en bas de page).
Pour nous, il est clair que les marchés carbone, en distribuant des permis de polluer, en permettant de nouvelles formes de spéculations sur les marchés financiers, sont constitutifs d’une démarche de greenwashing hautement condamnable.
WHERE DID ALL THE MONEY GO? How EU member states spent their ETS revenues – And why tighter rules are needed (Novembre 2022)