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L’ESSENTIEL
Les enseignements scolaires ont certes (légèrement) évolué ces dernières années. Ils sont hélas bien en retard, et ce n’est pas peu dire, par rapport aux enjeux réels. En raison du désintérêt, de l’incompétence et du déni de la part des ministères successifs, du conseil supérieur des programmes, mais aussi d’une grande partie des enseignant.es, la bifurcation écologique y demeure invisible. Au mieux, « l’éducation au développement durable » fait perdurer l’illusion de la croissance verte…
L’architecture globale de l’enseignement tel qu’il est pratiqué aujourd’hui se caractérise d’abord par un cloisonnement mortifère des « disciplines ». La raison en est simple : c’est, en premier lieu, la logique productiviste qui a modelé l’actuelle forme scolaire, c’est-à-dire « l’ensemble des dispositifs matériels et intellectuels mis en place par et dans les institutions scolaires » (voir notre dossier).
Rompre avec cette logique en silo est la première chose à faire pour réinventer une pédagogie critique (ou une véritable éducation à l’esprit critique) et préparant les enfants et adolescents à une approche systémique des sujets.
Au-delà de la question pédagogique, il existe maintes voies pour viser de nouveaux savoirs utiles.
Prenons quelques exemples. Cette énumération est certes extrêmement parcellaire mais elle vise juste à illustrer notre propos par des items concrets.
– En technologie, nous pourrions approfondir les low-tech, les énergies renouvelables (qui sont simplement survolées, et encore !). Il serait aussi possible, à compter d’en avoir le courage, de déconstruire le mythe de la « voiture électrique pour tous ». Il suffit de faire calculer combien il faudrait de nouvelles centrales nucléaires (ou de champs d’éoliennes ou de parcs solaires) pour alimenter leurs moteurs (la bonne réponse est… 15 réacteurs supplémentaires !)…
– En géographie, il est tout à fait possible d’aborder la notion de redirection écologique des territoires, de regarder de bien plus près les régions du monde les plus touchées par le réchauffement climatique, d’approfondir la connaissance de l’Arctique et de l’Antarctique (faire visionner des vidéos d’Heïdi Sevestre !), du pergélisol, ou la question du trait de côte… La nécessité d’apprendre à s’adapter du mieux possible aux chaleurs extrêmes pourrait être une bonne occasion de découvrir d’autres modes de vie (comme celui des Touaregs !).
– En SVT, il faudrait, là encore aller beaucoup plus loin sur la climatologie, la biodiversité ou le concept de réensauvagement…
– Même les maths peuvent être concernés puisqu’il n’y a rien de plus motivant que d’aborder la trigonométrie en faisant… de l’astronomie (ce qui évidemment apporte une autre vision de la Terre). De même, en faisant les plans d’une maison en auto / écoconstruction, πR2 ou le théorème de Pythagore prennent tout leur sens dans leur mise en pratique (voir les cours intelligents que dispense ce professeur ICI).
A toutes ces propositions, nous nous sommes déjà heurtés aux discours prémâchés des personnels.
Or, même la surcharge (bien réelle) des classes n’est pas recevable. Il reste toujours possible d’aller puiser dans de nombreuses techniques pédagogiques pour, entre autres choses, faire des sous-groupes, responsabiliser les élèves dans le fonctionnement de ces groupes, etc. La liberté pédagogique peut être invoquée et face aux éventuelles mesures de rétorsion de l’Etat, la mobilisation collective est la seule réponse (et elle fonctionne). C’est une question d’audace, à condition d’être soi-même convaincu que les enseignements actuels ne conviennent pas, et d’avoir la volonté d’œuvrer à une transformation de notre monde. C’est sans doute là que le bât blesse. Puisque, il faut bien oser le dire, une grande partie des enseignant.es ne souffre aucune critique et aucune remise en cause de leurs pratiques.
Réinventer la classe pour mieux apprendre : du modèle traditionnel à la salle flexible ? (The Conversation, Septembre 2024)
Dans de nombreuses écoles primaires, et davantage encore dans le secondaire, si une personne scolarisée il y a cinquante ans entrait aujourd’hui dans une salle de classe, elle ne serait pas vraiment dépaysée.

Héritière d’une « tradition » de surveillance plutôt que d’apprentissage, la « classe autobus » continue de faire recette, avec ses pupitres simples ou doubles, placés les uns derrière les autres, en deux ou trois colonnes séparées par des travées où circule le maître. Tous font face au tableau et au bureau de l’enseignant. Il s’agit, de fait, de la disposition rituelle des examens, du brevet des collèges au bac, et des concours.
Si la manière d’« habiter l’école » préoccupe architectes ou acteurs de la politique de la ville, l’organisation de la classe, lieu d’apprentissage et de vie sociale, interroge l’évolution des structures spatiales au bénéfice des démarches cognitives d’une part et des interactions nouées d’autre part.