Retour au menu

L’ESSENTIEL
Il existe des approches variées pour aboutir à un modèle d’agriculture respectueux non seulement du sol, mais de l’ensemble des écosystèmes et des Humains.
Parmi ces approches, nous pouvons citer la permaculture (née en 1970 en Australie sous la plume de Bill Mollison et David Holmgren qui se sont eux-mêmes inspirés des pratiques du japonais Masanobu Fukuoka), le maraîchage sur sol vivant (qui reprend les travaux des trois auteurs cités précédemment en rajoutant des techniques de l’agriculture de conservation comme les semis sous couverts), l’agroforesterie (qui intègre aussi bien les arbres dans les pratiques et les espaces agricoles, que les productions agricoles dans les pratiques forestières et les espaces arborés) ou encore l’agriculture paysanne (qui recherche à garantir économiquement et socialement le travail de paysans locaux contre le modèle industriel et financiarisé).
Dans la réalité, il n’y a pas schémas stricts avec des « recettes clés en main ». A partir des principes et des valeurs, chacun apprend en permanence des autres (ou le devrait !) et à adapter chaque ferme au contexte local, en tenant compte de ses moyens, du terrain, etc. Ainsi, il est possible de s’inspirer tout autant de la ferme du Perche, de connecter enjeux alimentaires, sociaux et culturels comme à la Terre de Milpa, de penser les initiatives et l’accompagnement des collectifs en essayant d’apporter une réponse à la très problématique question du foncier, à l’instar de la coopérative des fermes partagées.
Oui, une « agriculture bio » peut nourrir la planète
En 2020, il y a seulement 9,5% des surfaces agricoles en bio.
Mais, et à l’échelle européenne, le scénario Ten Years For Agroecology in Europe montre qu’une agriculture sans intrants de synthèse permettrait de nourrir la population européenne en 2050 (lire le billet de présentation). Ce scénario repose sur une optimisation et une réorientation des surfaces agricoles. La baisse de la consommation de produits d’origine animale permettrait d’assumer la baisse des rendements due à la généralisation de l’agriculture biologique et une augmentation des surfaces affectées à la production de protéines végétales.
–L’étude du CNRS (2021) confirme également la viabilité de cette hypothèse.
Enfin, lorsque l’on veut comparer les « avantages et inconvénients » entre l’agroécologie et l’agriculture conventionnelle, il ne faut pas oublier la question de la qualité des aliments avec, notamment, la présence dans les productions biologiques de composés phytochimiques bénéfiques pour la santé, alors que les productions de l’agriculture conventionnelle sont riches… en traces de pesticides et de métaux lourds ! Sur ce sujet, vous pouvez consulter l’étude figurant en bas de page « Soil Health and Nutrient Density: Beyond Organic vs. Conventional Farming » cette étude.
L’enjeu des semences
« Il y a 10.000 ans, le paysan était le premier sélectionneur de graines. Puis, on a créé le métier de semencier et le paysan a été dépossédé, après guerre, de cette partie de l’activité de la ferme« ,
Véronique Chable, agronome et chercheuse à l’Inrae.
Avec l’industrialisation de l’agriculture, les semences développées en laboratoire sont « certes adaptées pour l’agriculture conventionnelle mais pas pour le bio qui nécessite de travailler sans intrants (pesticides, eau, engrais, ndlr) dans des champs très diversifiés » (source)
Le développement de la diversité dans les champs est également l’une des clés pour lutter contre le changement climatique, comme l’explique Véronique Chable dans son livre « La graine de mon assiette » (ed. Apogée). « Des plantes homogènes seront moins résistantes aux maladies ou aux événements climatiques« , observe la chercheuse, favorable à un assouplissement de la réglementation afin d’autoriser les ventes de semences paysannes à grande échelle.
A noter que d’après un document de l’ONU de 2015, « au cours des deux dernières décennies, 75 % de la diversité génétique des cultures agricoles a été perdue ». Au XIXème siècle, il y avait environ 10 000 espèces de blé. De nos jours, il n’en existe qu’une dizaine.
La définition de l’agroécologie par « Terre et Humanisme »
Aujourd’hui reconnue comme une discipline essentielle, l’agroécologie est hissée par les milieux scientifiques au premier rang des solutions face au changement climatique. L’agroécologie respecte les écosystèmes naturels et intègre les dimensions économiques, sociales et politiques de la vie humaine. Elle conçoit une approche globale qui concilie agriculture, écologie, productivité, activité humaine et biodiversité.
En replaçant l’humain au cœur des écosystèmes, l’agroécologie selon Terre & Humanisme apporte un ensemble de clés pour réussir ensemble la transition. Son objet ne consiste pas uniquement à prendre soin du sol, de la plante, de l’animal ou de l’être humain, mais aussi à considérer l’ensemble des éléments de l’écosystème et des systèmes sociaux et à veiller à la qualité de leurs interrelations.
En ce sens, l’agroécologie est un équilibre harmonieux mêlant agriculture et écologie, quantité et qualité, activités humaines et biodiversité, philosophie et techniques, écosystèmes et systèmes sociaux.

Une agriculture européenne sans pesticides en 2050 ? (INRAE, novembre 2023)
Réduire drastiquement nos usages de pesticides, diminuer nos émissions de gaz carbonique, en particulier d’origine agricole, satisfaire la demande alimentaire, atteindre une souveraineté alimentaire, préserver la santé humaine, protéger notre environnement… autant d’impératifs concourant à notre bien-être commun et qui ne sont pas simples à atteindre ! Sont-ils seulement compatibles ? L’exercice de prospective « Agriculture européenne sans pesticides en 2050 », réalisé par INRAE, aide à mieux cerner les leviers mobilisables et les trajectoires possibles pour supprimer les pesticides chimiques. Nous vous proposons d’en décortiquer quelques éléments pas à pas…
Prairies, puits de carbone ? (Article issu de Critical Vegan, Paul Aries, Février 2020)
Cet article est l’un des meilleurs (sinon le meilleur) que nous avons pu lire sur la question de l’élevage, des prairies et du stockage carbone.
La conclusion de l’auteur :
Les ruminants ont bel et bien la capacité de favoriser la séquestration de carbone par les prairies. Dans certaines régions, des taux de séquestration élevés peuvent effectivement être atteints. Cependant, la relation entre pâturage et séquestration est extrêmement complexe et sensible au contexte. Elle est influencée par des variables telles que le climat, le type de terrain, la qualité des sols, les espèces végétales en présence, etc. De manière générale, il semble que sur un terrain qui n’a pas atteint l’équilibre en carbone, un pâturage à intensité faible ou modérée tende à favoriser la séquestration. Ce que constitue une intensité « faible » ou « modérée » est en revanche très dépendant du contexte.
À l’inverse, un pâturage trop intensif tend à endommager les sols et à provoquer un rejet de carbone. Finalement, il faut retenir qu’il n’existe aucune formule magique assurant de favoriser la séquestration sur n’importe quel terrain. Les pratiques doivent être adaptées aux conditions locales, ce qui ne se fait pas d’un simple claquement de doigts. Il faut bien faire attention à ce point : des chiffres locaux, aussi fantastiques soient-ils, ne peuvent pas être extrapolés au monde entier.
De plus, cette séquestration de carbone a un coût : les ruminants sont de gros émetteurs de gaz à effet de serre. Même en se basant sur des estimations optimistes du potentiel de séquestration atteignable, on ne compenserait qu’au mieux 10 à 15 % des émissions de ce type d’élevage. Pire que cela, ce niveau de compensation ne pourrait être maintenu au mieux que quelques décennies, le taux de séquestration chutant naturellement au cours du temps. Les émissions, elles, ne disparaissent pas. Et si cela n’était pas suffisant, rien ne garantit que le carbone ainsi stocké puisse être maintenu dans les sols.
Il me semble qu’il faut être clair : oui, une prairie est en général bien, stricto sensu, un puits de carbone. En tout cas en Europe. Cela ne suffit cependant absolument pas à compenser les émissions dues aux animaux qui la parcourent.
Non, une prairie avec ses vaches n’est pas un puits de carbone. Non, une côte de bœuf n’est pas un produit écologique. Non, les ruminants ne sont pas un remède miracle contre le réchauffement climatique. Oui, les ruminants contribuent au problème.
Bien sûr, les émissions de GES ne sont pas le seul critère sur lequel juger ce type d’élevage. J’ai évoqué différents points dans d’autres articles (ici, ici et là). Ceci dit, la conclusion de Garnett et coll. (5) me semble plutôt explicite :
La conclusion inévitable de ce rapport est que bien que les ruminants aient leur place dans un système alimentaire durable, cette place est limitée. Quelle que soit la façon dont on aborde le problème, et quel que soit le système en question, la hausse continue et attendue de production et de consommation de produits animaux est une raison de s’inquiéter. Avec leur croissance, il devient plus difficile jour après jour de surmonter nos défis climatiques et environnementaux.
Voir la source : https://criticalvegan.com/2020/02/20/prairies-puits-de-carbone/
Soil Health and Nutrient Density: Beyond Organic vs. Conventional Farming (Frontiers, Novembre 2021).
Santé des sols et densité nutritionnelle : au-delà de l’agriculture biologique et conventionnelle
Santé des sols et densité nutritionnelle : au-delà de l’agriculture biologique et conventionnelle
Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2025-2034 (15 juillet 2025)
Les Perspectives agricoles de l’OCDE et de la FAO 2025-2034 contiennent une évaluation exhaustive de ce que pourrait être l’évolution, sur les dix ans à venir, des marchés nationaux, régionaux et mondiaux des produits agricoles, halieutiques et aquacoles.
L’une des tendances dominantes de la décennie sera la progression de la consommation d’aliments d’origine animale, portée essentiellement par l’élévation du niveau de vie et l’urbanisation dans les pays à revenu intermédiaire. La production agricole, halieutique et aquacole mondiale devrait progresser de 14 % au cours des dix années à venir, portée principalement par les gains de productivité, dans les pays à revenu intermédiaire notamment. Ces gains de productivité contribueront à réduire l’intensité des émissions et à limiter à 6 % l’augmentation attendue des émissions directes de gaz à effet de serre (GES) imputables à l’agriculture.
Les simulations de scénarios indiquent que l’élimination de la sous-alimentation à l’horizon 2034 peut aller de pair avec une baisse des émissions de GES de l’ordre de 7 % à condition d’investir simultanément en faveur des technologies de réduction des émissions et d’une hausse de 15 % de la productivité agricole.
L’existence d’un système commercial fondé sur des règles demeure indispensable à la sécurité alimentaire mondiale et à la subsistance des populations rurales. Les prix internationaux de référence réels devraient rester orientés légèrement à la baisse et pousser de ce fait les petits exploitants à améliorer leur productivité pour ne pas perdre en compétitivité.
On trouvera de plus amples informations à l’adresse suivante : www.agri-outlook.org/fr/.