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L’ESSENTIEL
L’étude Planetary boundaries: Guiding human development on a changing planet est publiée le 15 janvier 2015. Elle met à jour les précédents travaux.
Selon les chercheurs Trois des limites planétaires (changement climatique, appauvrissement de la couche d’ozone stratosphérique et acidification des océans) demeurent essentiellement inchangées par rapport à l’analyse précédente. Des limites au niveau régional ainsi que des limites planétaires agrégées au niveau mondial ont maintenant été développées pour l’intégrité de la biosphère (auparavant appelée « perte de biodiversité »), les flux biogéochimiques, le changement du système terrestre et l’utilisation de l’eau douce. À l’heure actuelle, seule une limite régionale (la mousson d’Asie du Sud) peut être établie pour le chargement en aérosols atmosphériques. Bien que nous ne puissions pas identifier une seule limite planétaire pour les entités nouvelles (définies ici comme de nouvelles substances, de nouvelles formes de substances existantes et des formes de vie modifiées susceptibles d’avoir des effets géophysiques et/ou biologiques indésirables), elles sont incluses dans le cadre des limites planétaires, compte tenu de leur potentiel à modifier l’état du système terrestre. Deux des limites planétaires – le changement climatique et l’intégrité de la biosphère – sont reconnues comme des limites planétaires « centrales » en raison de leur importance fondamentale pour le système terrestre. Le système climatique est une manifestation de la quantité, de la répartition et du bilan net d’énergie à la surface de la Terre ; la biosphère régule les flux de matière et d’énergie dans le système terrestre et accroît sa résilience aux changements brusques et graduels. Les niveaux de perturbation anthropique de quatre des processus/caractéristiques du système terrestre (changement climatique, intégrité de la biosphère, flux biogéochimiques et changement du système terrestre/ utilisation des sols) dépassent la limite planétaire proposée (voir la figure).
En résumé :
Changement climatique > dépassée
Changements dans l’intégrité de la biosphère (ex « perte de la biodiversité ») > dépassée
Appauvrissement de la couche d’ozone stratosphérique
L’acidification des océans
Flux biogéochimiques > dépassée
Changement dans l’utilisation des sols > dépassée
Utilisation de l’eau douce
Présence / concentration d’aérosols atmosphériques
Introduction de nouvelles entités dans l’environnement
Le 18 janvier 2022 , une nouvelle étude vient souligner le dépassement de la limite planétaire pour les entités nouvelles.
Cette étude se centre sur l’introduction d’entités nouvelles, polluantes, dans notre environnement.
Pour les chercheurs : « Nous soutenons que l’espace de fonctionnement sûr de la frontière planétaire des entités nouvelles est dépassé puisque la production et les rejets annuels augmentent à un rythme qui dépasse la capacité mondiale d’évaluation et de surveillance. La limite des entités nouvelles dans le cadre des frontières planétaires fait référence aux entités qui sont nouvelles au sens géologique et qui pourraient avoir des impacts à grande échelle menaçant l’intégrité des processus du système terrestre. Nous passons en revue la littérature scientifique pertinente pour la quantification de la frontière des entités nouvelles et soulignons que la pollution plastique est un aspect particulier très préoccupant. Nous présentons une voie d’impact allant de la production de nouvelles entités aux impacts sur les processus du système terrestre. Nous définissons et appliquons trois critères d’évaluation de l’adéquation des variables de contrôle pour la frontière : la faisabilité, la pertinence et l’exhaustivité. Nous proposons plusieurs variables de contrôle complémentaires pour saisir la complexité de cette frontière, tout en reconnaissant les limitations majeures des données. Nous concluons que l’humanité opère actuellement en dehors de la limite planétaire sur la base du poids de la preuve pour plusieurs de ces variables de contrôle. Le rythme croissant de production et de rejet de volumes plus importants et d’un nombre plus élevé d’entités nouvelles présentant des risques potentiels divers dépasse la capacité des sociétés à effectuer des évaluations et des contrôles liés à la sécurité. Nous recommandons de prendre des mesures urgentes pour réduire les dommages associés au dépassement de la limite en réduisant la production et les rejets de nouvelles entités, tout en notant que, même ainsi, la persistance de nombreuses nouvelles entités et/ou leurs effets associés continueront à constituer une menace. ».
Une nouvelle étude paraît en 2023 (31 mai) : « Limites du système terrestre sûres et justes »
La situation s’avère plus qu’alarmante. Plus de quarante chercheurs, avec Johan Rockström, repartent sur huit indicateurs cruciaux pour la stabilité du système Terre. Selon eux, seule la charge en aérosols atmosphériques serait encore « tolérable » et « Sept des huit ESB (Earth system boundaries) sûrs et justes quantifiés à l’échelle mondiale (…) sont déjà dépassés ».
En résumé :
le climat, > dépassée
le cycle de l’azote, > dépassée
le cycle du phosphore, > dépassée
l’état des eaux de surface, > dépassée
l’état des eaux souterraines, > dépassée
l’étendue des espaces naturels intacts, > dépassée
l’intégrité fonctionnelle des écosystèmes modifiés par l’humain, > dépassée
la pollution par les aérosols : c’est la seule limite à ne pas être dépassée (mais il faut rajouter la couche d’ozone, en – difficile – voie de rétablissement). Ce qui fait 7 limites dépassée sur 9 (mais en comptant séparément le cycle du phosphore et celui de l’azote).
Un extrait de l’étude :
« La stabilité et la résilience du système Terre et le bien-être humain sont indissociables, mais leurs interdépendances sont généralement sous-estimées ; par conséquent, ils sont souvent traités de manière indépendante. Ici, nous utilisons la modélisation et l’évaluation de la littérature pour quantifier les limites sûres et justes du système terrestre (ESB) pour le climat, la biosphère, les cycles de l’eau et des nutriments et les aérosols à l’échelle mondiale et sous-mondiale. Nous proposons des ESB pour maintenir la résilience et la stabilité du système terrestre (ESB sûrs) et minimiser l’exposition aux dommages importants causés aux humains par le changement du système terrestre (une condition nécessaire mais pas suffisante pour la justice). La plus stricte des limites sûres ou justes définit l’ESB intégré sûr et juste. Nos résultats montrent que les considérations de justice limitent davantage les ESB intégrés que les considérations de sécurité en matière de climat et de charge d’aérosols atmosphériques. Sept des huit ESB sûrs et justes quantifiés à l’échelle mondiale et au moins deux ESB sûrs et justes régionaux sur plus de la moitié de la superficie terrestre mondiale sont déjà dépassés ».
Lors de la conférence de presse qui se tient suite à la publication de l’étude, Johan Rockström déclare : « Si la planète était un corps, tous ses organes seraient affectés. Ses poumons, mais aussi ses reins, son foie… ». A un journaliste qui lui demande s’il est encore temps d’agir, il répond : « La fenêtre est encore ouverte, mais elle commence à se fermer. »
En septembre 2024, l’Institut de Potsdam pour la recherche sur l’impact du climat publie le rapport « Bilan de santé planétaire 2024 : une évaluation scientifique de l’état de la planète« . Pour les auteurs, une septième limite serait sur le point d’être dépassée : l’acidification des océans.
« L’acidification des océans approche d’un seuil critique, avec une baisse significative de la saturation en aragonite de surface, en particulier dans les régions de haute latitude comme l’Arctique et l’océan Austral. Ces zones sont vitales pour la pompe à carbone marine et les cycles mondiaux des nutriments, qui soutiennent la productivité marine, la biodiversité et la pêche mondiale. L’acidification croissante constitue une menace croissante pour les écosystèmes marins, en particulier ceux qui dépendent du carbonate de calcium pour la formation des coquilles. »
En septembre 2025, et dans son nouveau rapport, l’institut de Postdam estime cette 7ème limite clairement dépassée.