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L’ESSENTIEL
Dans leur rapport publié en juin 2021, l’Institut Rousseau, les Amis de la Terre France et Reclaim Finance, soutenus par 12 organisations de la société civile révèlent que les grandes banques européennes ont accumulé 532 milliards d’euros d’actifs liés aux énergies fossiles – soit l’équivalent de 95% du total de leurs fonds propres – et seraient en difficulté en cas de chute rapide de la valeur de ces actifs. Les auteurs soulignent la paralysie du secteur bancaire qu’induit cette situation, limitant sa capacité à contribuer au financement de la transition écologique, et le risque d’un effet boule de neige dégénérant en crise financière.
Extrait :
« Tout nouvel investissement dans les énergies fossiles crée un actif financier dont la valeur repose sur un modèle économique incompatible avec un monde à + 1,5 °C ou même + 2 °C. Il en découle que tous les actifs fossiles subiront des pertes de valeur brutales ou totales avec la transition, devenant à plus ou moins long terme des « actifs échoués »12. Ce risque est depuis quelques années sur toutes les lèvres, et notamment celles de l’ex-Gouverneur de la Banque d’Angleterre Mark Carney. Celui-ci déclarait en 2015 que respecter le budget carbone fixé par le GIEC rendrait la vaste majorité des réserves de pétrole, gaz et charbon « échouée », et alertait sur l’exposition potentiellement énorme des investisseurs britanniques à ces risques climatiques.
Face à cette éventualité, les entreprises et acteurs financiers qui détiennent des quantités massives d’actifs fossiles pourraient avoir tendance à retarder la transition, alors même que ces énergies ne sont plus compétitives. En effet, d’après l’IRENA14, de 75 à 80 % de l’énergie éolienne terrestre et du solaire mis en service en 2020 à la suite d’enchères ou d’appels d’offres permettent déjà la production d’électricité à des prix inférieurs à toute alternative fossile.
Stranded fossil-fuel assets translate to major losses for investors in advanced economies (Les actifs échoués liés aux combustibles fossiles se traduisent par des pertes importantes pour les investisseurs dans les économies avancées), mai 2022 – Nature Climate Change.
Selon les auteurs de cette étude (Gregor Semieniuk et associés) :
« La répartition de la propriété du risque de transition associé aux actifs fossiles échoués reste mal comprise. Nous calculons que les actifs bloqués à l’échelle mondiale, en tant que valeur actuelle des profits perdus à venir dans le secteur pétrolier et gazier en amont, dépassent 1 000 milliards de dollars américains sous l’effet de changements plausibles dans les attentes concernant les effets de la politique climatique.
Nous retraçons la propriété du risque actions depuis 43 439 actifs de production pétrolière et gazière à travers un réseau mondial de capitaux propres de 1,8 million d’entreprises jusqu’à leurs propriétaires ultimes.
La majeure partie du risque de marché pèse sur les investisseurs privés, en grande majorité dans les pays de l’OCDE, y compris une exposition importante via les fonds de pension et les marchés financiers. La répartition de la propriété révèle un transfert net international de plus de 15 % du risque mondial des actifs échoués vers les investisseurs basés dans l’OCDE.
Les parties prenantes des pays riches ont donc un intérêt majeur dans la manière dont la transition de la production pétrolière et gazière est gérée, en tant que partisans constants de l’économie des combustibles fossiles et propriétaires potentiellement exposés d’actifs bloqués.