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L’ESSENTIEL
Face à la triple rupture climatique, écologique et sociale qui bouleverse la planète, il est devenu évident que ces enjeux transcendent les frontières. Les dérèglements climatiques, la perte de biodiversité et les pollutions systémiques ne connaissent pas de limites géographiques. Ils s’enracinent dans des dynamiques globalisées et affectent l’humanité de manière profondément inégale. Dès lors, ces luttes ne peuvent se penser qu’à l’échelle internationale et dans une perspective de justice sociale mondiale.
Les populations les moins responsables des émissions de gaz à effet de serre sont souvent les plus durement touchées.
Les habitants des petits États insulaires subissent déjà la montée des eaux, les sécheresses ravagent des régions entières en Afrique, et les vagues de chaleur deviennent létales dans des zones pauvres où les infrastructures manquent cruellement. Dans le même temps, les pays riches, historiquement responsables de la majorité des émissions, continuent d’exploiter des ressources naturelles dans le « Sud global », renforçant les inégalités écologiques et économiques.
Face à cela, les réponses purement nationales ne peuvent être suffisantes. Un pays seul ne peut contenir un réchauffement climatique global ni enrayer une pollution plastique qui envahit les océans.
C’est dans ce contexte que la justice sociale mondiale prend tout son sens : il s’agit de reconnaître que les injustices environnementales sont aussi des injustices sociales. Défendre le climat et la biodiversité, c’est aussi garantir les droits fondamentaux des plus vulnérables : le droit à l’eau, à l’air pur, à une alimentation suffisante, et à un cadre de vie sain.
La question de la dette écologique des pays historiquement émetteur ne peut plus continuer à être niée comme elle l’est encore aujourd’hui !
Comme nous l’évoquions dans la fiche « Agir pour une refondation démocratique, égalitaire et solidaire » ainsi que dans notre dossier « Quel diagnostic et quelles perspectives ? : « Au fil des COP, les pays riches ont travaillé sans relâche… pour effacer ou noyer la notion d’équité dans les négociations. Si l’accord de Paris, en 2015, a été encensé, c’est parce qu’il faisait fi du concept d’émissions historiques et qu’il a relégué la justice climatique à une note de bas de page (Sunita Narain, 2022) ».
Certains travaux ont tenté de chiffrer le montant de cette dette. Selon une étude publiée dans Nature Climate Change en 2021, entre 1990 et 2015, les pays riches ont économisé environ 6 000 milliards de dollars en externalisant les coûts climatiques, tout en transférant les impacts sur les pays en développement.
A noter, et c’est important, que la dette écologique n’est seulement une dette climatique. C’est également une dette liée à l’extraction des ressources, aux véritables pillages qui ont été effectués pour exploiter les minerais, le bois, le pétrole, les terres agricoles), cela pour alimenter la croissance économique des pays industrialisés. Une étude de 2020 (Global Environmental Change) estime que la « captation nette des ressources » par les pays riches a généré une dette d’environ 10 800 milliards de dollars entre 1990 et 2015.
Nous pouvons encore parler de dette en termes de biodiversité. La destruction d’écosystèmes dans les pays du Sud, souvent pour satisfaire la demande en produits de luxe ou agricoles des pays riches, a des coûts écologiques considérables. Ces coûts, bien qu’encore difficiles à chiffrer précisément, incluent des pertes de services écosystémiques estimées à des milliers de milliards de dollars chaque année.
Enfin, il y a la dette liée aux pollutions, et elle n’est pas négligeable ! Les déchets toxiques, plastiques ou électroniques, souvent exportés illégalement ou gérés de manière « inéquitable » dans les pays dits « en développement », génèrent des coûts sanitaires et environnementaux massifs.
Au bout du compte, une évaluation complète a été menée en 2021 par Jason Hickel (Ecological Economics), estimant la dette écologique à plus de 62 000 milliards de dollars accumulés depuis 1960. Cela représente environ 2 à 3 % du PIB mondial annuel pendant des décennies. Cette somme inclut les destructions d’écosystèmes et les coûts environnementaux externalisés, les émissions excédentaires de gaz à effet de serre des pays riches, les flux de ressources injustes (extraction et commerce inégal).
Adaptation Gap Report, Unep, novembre 2024 – « Alors que les incendies et les inondations frappent durement les plus pauvres, il est temps que le monde intensifie ses mesures d’adaptation«
Résumé :
Le rapport constate que les progrès en matière de financement de l’adaptation ne sont pas assez rapides pour combler l’énorme écart entre les besoins et les flux, ce qui contribue à un retard persistant dans la planification et la mise en œuvre de l’adaptation.
Les flux internationaux de financement public de l’adaptation aux pays en développement sont passés de 22 milliards de dollars US en 2021 à 28 milliards de dollars US en 2022 : la plus forte augmentation absolue et relative d’une année sur l’autre depuis l’Accord de Paris. Cela reflète les progrès réalisés vers le Pacte climatique de Glasgow, qui a exhorté les pays développés à au moins doubler le financement de l’adaptation aux pays en développement de 19 milliards de dollars US (niveaux de 2019) d’ici 2025. Cependant, même atteindre l’objectif du Pacte climatique de Glasgow ne réduirait que d’environ 5 % le déficit de financement de l’adaptation, qui est estimé à 187-359 milliards de dollars US par an.
Le rapport appelle les nations à intensifier leurs efforts en adoptant un nouvel objectif collectif quantifié et fort pour le financement climatique et en incluant des composantes d’adaptation plus fortes dans leur prochaine série d’engagements climatiques, ou contributions déterminées au niveau national, attendues début 2025.
Compte tenu de l’ampleur du défi, combler le déficit de financement de l’adaptation nécessitera également des approches innovantes pour mobiliser des ressources financières supplémentaires. Le renforcement des facteurs favorables est essentiel pour débloquer un financement innovant de l’adaptation. Un investissement dans une adaptation stratégique et transformationnelle, plus difficile à financer, sera également nécessaire. Le financement de l’adaptation doit passer d’un financement réactif, progressif et basé sur des projets à une adaptation plus anticipative, stratégique et transformationnelle.
En plus du financement, il est nécessaire de renforcer le renforcement des capacités et le transfert de technologie pour améliorer l’efficacité des mesures d’adaptation. Le rapport fournit des recommandations pour améliorer les efforts, qui sont souvent non coordonnés, coûteux et à court terme.
Dans l’ensemble, des efforts accrus seront nécessaires pour atteindre l’objectif mondial d’adaptation à travers les onze cibles du Cadre des Émirats arabes unis pour la résilience climatique mondiale.