Un dérèglement global des cycles de l’eau

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La végétation a également un rôle crucial. Les forêts, en particulier, agissent comme de véritables régulateurs hydriques : elles favorisent l’infiltration, ralentissent les écoulements, et renvoient dans l’atmosphère une partie de l’eau via l’évapotranspiration.

On oublie aussi souvent que les forêts agissent comme de véritables stations d’épuration naturelles. Lorsque l’eau s’infiltre lentement dans un sol forestier, elle traverse une épaisse couche de matière organique vivante : humus, racines, champignons, bactéries, microfaune du sol. Ce réseau d’organismes souterrains joue un rôle décisif dans la filtration, la dégradation des polluants et la régénération de la qualité de l’eau. Contrairement aux zones urbanisées ou aux champs nus, les forêts laissent le temps à l’eau de s’infiltrer doucement, tout en l’enrichissant biologiquement et en la nettoyant. Elles sont ainsi des alliées fondamentales du cycle de l’eau, et leur destruction entraîne à la fois un appauvrissement de la ressource et une dégradation de sa qualité.

La déforestation perturbe ces équilibres et contribue à assécher les sols. D’autres facteurs, plus localisés, s’ajoutent : les barrages modifient les débits des rivières ; les activités industrielles captent ou polluent la ressource ; le tourisme (neige artificielle, golfs, stations balnéaires) exerce une pression croissante.

Enfin, la fonte accélérée des glaciers et des calottes glaciaires – la cryosphère – vient ajouter une dimension temporelle inquiétante : ces réserves d’eau douce, souvent surnommées « châteaux d’eau » de la planète, disparaissent à grande vitesse, menaçant l’approvisionnement futur de millions de personnes.

Ainsi, loin d’être un mécanisme figé ou purement naturel, le cycle de l’eau est un système dynamique, sensible, et de plus en plus fragilisé. Il relie les sols, les climats, les écosystèmes, les usages humains. En déréglant un maillon, c’est l’ensemble du cycle que l’on déséquilibre. C’est pourquoi repenser nos usages, restaurer les capacités d’infiltration des sols, protéger les milieux humides et adopter des pratiques agricoles et urbaines compatibles avec le cycle naturel de l’eau est aujourd’hui une condition incontournable de toute résilience territoriale.

Les impacts actuels du réchauffement climatique sur les cycles de l’eau

Le réchauffement climatique n’est pas seulement une affaire de degrés : il bouleverse en profondeur le fonctionnement du cycle de l’eau à toutes les échelles. En effet, un principe physique fondamental nous apprend que pour chaque degré Celsius supplémentaire, la capacité de l’atmosphère à retenir la vapeur d’eau augmente d’environ 7 %. Une atmosphère plus chaude agit donc comme une éponge plus grande, capable de capter davantage d’humidité depuis les océans, les sols ou la végétation. Mais une fois saturée, cette éponge relâche son contenu sous forme de précipitations brutales, souvent concentrées dans le temps et l’espace : orages violents, pluies diluviennes, inondations éclairs. Ces épisodes deviennent plus fréquents et plus intenses dans un climat plus chaud.

À l’inverse, lorsque cette humidité atmosphérique ne condense pas localement, elle s’éloigne vers d’autres régions et laisse place à des périodes de sécheresse prolongée, parfois sévères. En amplifiant à la fois l’évaporation (par les fortes températures) et l’irrégularité des précipitations, le réchauffement climatique désorganise les équilibres hydriques. Les saisons des pluies sont décalées ou raccourcies, les périodes de recharge des nappes ne coïncident plus avec les besoins agricoles ou humains, et l’eau, même lorsqu’elle tombe en abondance, n’a plus le temps de s’infiltrer. Les sols secs deviennent hydrophobes, accélérant le ruissellement, l’érosion et les crues. Les zones humides s’assèchent, les nappes phréatiques ne se reconstituent plus, et les glaciers, qui alimentaient de nombreux fleuves en été, fondent à un rythme alarmant : trop d’eau aujourd’hui, puis plus du tout demain.

State of Global Water
Resources, 2024
WMO-No. 1380
WEATHER CLIMATE WATER
Report

Déluges, sécheresses et risques d’inondations touchent désormais des milliards de personnes. L’Organisation météorologique mondiale tire la sonnette d’alarme face à une sixième année consécutive de net déséquilibre du cycle hydrologique de la planète.

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