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L’ESSENTIEL
« Saturation » des forêts tropicales
La surface terrestre de la planète élimine actuellement environ 30 % de toutes les émissions de CO2 générées par l’homme, les forêts tropicales jouant un rôle majeur dans ce “puits de carbone”.
Selon les projections, les forêts tropicales africaine et amazonienne devaient, pour les décennies à venir, continuer d’absorber les émissions de carbone dégagées dans l’atmosphère. Elles sont ainsi de responsables d’environ la moitié des capacités mondiales de séquestration de carbone.
Mais leur capacité à absorber les émissions de ces gaz à effet de serre sont en nette diminution.
Selon une étude publiée mercredi 4 mars 2020 dans la revue Nature par les chercheurs du Musée royal de l’Afrique centrale et de l’Université de Leeds la mécanique pourrait bientôt s’inverser et la forêt amazonienne commencer à émettre plus de CO2 qu’elle n’en capte.
Le cas des forêts françaises
Ces dernières ont perdu la moitié de leur capacité d’absorption CO2 en dix ans. En 2023, quatre chercheurs, dont Philippe Ciais, climatologue CEA au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, se sont penchés sur la santé des forêts françaises, fragilisées par les conséquences du changement climatique et par les activités humaines. Verdict : elles se détériorent à grande vitesse et pourraient bien perdre leur capacité à absorber le CO2. Une étude à lire dans un rapport publié par l’Académie des sciences et l’Académie d’agriculture de France, le 7 juin 2023 (voir en bas de page).
La situation des océans
L’océan est un important puits de carbone, capable de capturer le CO2 atmosphérique grâce au couplage de deux phénomènes, physique et biologique. Il séquestre ainsi près de 30 % du CO2 émis par les humains. De nombreux aspects du processus biologique, très complexe, restent méconnus et les scientifiques tentent d’en percer les secrets grâce à des campagnes océanographies et le déploiement d’instruments autonomes. Dans ce contexte, difficile pour eux de prédire comment le changement climatique va influencer cette pompe à carbone et quels effets cela aura sur le cycle global du carbone.
Lire l’article du CNRS (Juillet 2021)
En conclusion, les chercheurs écrivent :
« Le changement climatique transforme l’océan mais, étant donné que de nombreux mécanismes restent encore mal connus voir inconnus, les prévisions sont extrêmement difficiles à faire. On sait que le réchauffement de l’océan pourrait réduire l’efficacité de la pompe physique puisque c’est l’eau froide qui absorbe davantage le CO2. Il pourrait également ralentir la circulation thermohaline. Si celle-ci venait à s’arrêter, le climat terrestre s’en retrouverait très perturbé. « Aujourd’hui, les physiciens s’intéressent particulièrement aux structures océaniques de petite taille (10-100 km), explique Fabrizio d’Ortenzio. Comment vont-elles évoluer dans un contexte climatique en plein changement ? Vont-elles impacter la circulation thermohaline et comment ? Quelles rétroactions pourront-elles avoir sur le climat et les écosystèmes marins ? » Côté biologie, le réchauffement aura aussi des conséquences, mais lesquelles ? Par ailleurs, il n’est pas le seul phénomène à inquiéter les scientifiques. L’augmentation de l’absorption de CO2 provoque l’acidification des océans car lorsque le gaz carbonique se dissout dans l’eau de mer, il forme un acide carbonique. Que ce soit pour la pompe physique ou biologique, l’avenir est incertain et seuls le travail des scientifiques et le développement de nouveaux instruments pourront nous aider à l’éclairer.«
Sous les tropiques, les forêts intactes perdent leur capacité à absorber du carbone (CIRAD, mars 2020)
La capacité des forêts tropicales intactes à absorber le carbone de l’atmosphère diminue, selon une nouvelle étude publiée le 4 mars dans Nature . En Amazonie, le pic d’absorption semble avoir eu lieu dans les années 1990, alors qu’en Afrique, il s’est produit 10 ans plus tard. Depuis, cette absorption continue de diminuer. Cela vient remettre en cause l’idée selon laquelle ces forêts pourraient continuer à séquestrer du carbone pendant encore des années. Les scientifiques du Cirad rappellent toutefois le rôle que peuvent jouer les forêts exploitées de façon durable et les plantations forestières pour inverser cette tendance.
Rôle des forêts dans le bilan de carbone de la planète (Décembre 2021)
À l’échelle de la planète, les forêts constituent le principal puits de carbone en milieu continental. Cependant, à une échelle plus locale, si certaines forêts constituent bien des puits de carbone, d’autres jouent le rôle de sources. Le flux net de carbone dépend en effet de différents facteurs naturels et anthropiques. En particulier, les activités humaines peuvent aussi bien favoriser le stockage de carbone (protection et expansion des surfaces de forêts, effet fertilisant du CO2 libéré par les activités humaines) qu’au contraire en provoquer la libération (déforestation, dégradations).
Les forêts françaises face au changement climatique (Académie des Sciences, Juin 2023)
Les forêts françaises couvrent 31% du territoire métropolitain. Elles contribuent de multiples façons au bienêtre humain (production de bois, purification de l’air et de l’eau, maintien des sols, habitat pour la biodiversité, alimentation, santé, activités récréatives, etc.) et participent aux Objectifs de Développement Durable fixés par l’ONU. En particulier, la France s’étant engagée à atteindre la neutralité carbone dès 2050, le rôle de puits et de stockage de carbone des forêts est considéré comme un élément majeur de sa Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).
Depuis quelques années, les forêts françaises, dont la surface n’avait cessé de croître depuis plus d’un siècle, connaissent, de façon inquiétante, une diminution de productivité, des dépérissements massifs et un risque incendie accru. Le changement climatique en cours met ainsi en péril les ressources forestières et leur contribution attendue pour préserver la biodiversité, favoriser le développement rural et la bioéconomie, renforcer la production de bois, assurer le bien-être sociétal et équilibrer le bilan carbone de la France. Les enjeux sont considérables et l’orchestration des mesures à prendre s’avère extrêmement délicate en raison de la diversité des attentes de la société.
L’Académie des sciences dresse ici un état des lieux des connaissances actuelles sur les diverses contributions des forêts à la société, puis identifie les défis à relever au regard des menaces actuelles et à venir. Finalement, elle présente un ensemble de recommandations pour assurer simultanément la résilience des forêts, leur rôle de puits de carbone, la production de bois, la préservation de la biodiversité, et la qualité des autres contributions du milieu forestier au bien-être humain.